Créée en 2009, HYNES est une équipe commune de recherche entre l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) et la R&D d’EDF. Son objectif ? Comprendre et maitriser les impacts des aménagements de production d’électricité sur les écosystèmes aquatiques. Véronique Gouraud, chercheuse senior à la R&D d’EDF et directrice de HYNES, et Hilaire Drouineau, ingénieur de recherche à l’INRAE et co-directeur de HYNES, mettent leur expertise et leur passion pour l’environnement au service de cette équipe dont le défi est de concilier énergie et préservation de la biodiversité.

Depuis 15 ans, la R&D d’EDF et l’INRAE unissent leurs forces au sein de l'équipe commune HYNES pour comprendre et maîtriser les interactions de la production d’électricité avec les écosystèmes aquatiques. Ce partenariat rassemble une équipe pluridisciplinaire de 50 chercheurs. « La clé d’entrée dans cette équipe est l’écologie », précise Christine Argillier, chercheuse à l’INRAE. « Même si nous sollicitons parfois d’autres disciplines scientifiques comme l’hydraulique, l’hydrologie, la thermie, la sédimentologie, les statistiques ou l’acoustique... »

La R&D d'EDF partenaire de l'INRAE

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Pour vous permettre d'accéder à l'information, nous vous proposons de consulter la vidéo HYNES, pour préserver la biodiversité autour des sites de production d'électricité dans un nouvel onglet.

[Cette vidéo présente le partenariat entre la R&D d’EDF et l’INRAE à travers l’équipe de recherche commune HYNES, dédiée à l’étude de l’impact des centrales hydroélectriques et nucléaires sur les écosystèmes aquatiques. Elle fait intervenir Véronique Gouraud (chercheuse senior à la R&D d’EDF et directrice de HYNES) et Hilaire Drouineau (ingénieur de recherche à l’INRAE, département AQUA, co-directeur de HYNES).

Notre pitch

Véronique Gouraud : HYNES est une équipe commune de recherche qui rassemble des chercheurs d’EDF et de l’INRAE. Son objectif est de développer de nouvelles connaissances et des solutions qui vont permettre de maîtriser les impacts des activités d’EDF sur l’environnement. Plus précisément, nos travaux portent sur l’impact des aménagements hydroélectriques et des centrales nucléaires sur les écosystèmes aquatiques.

Hilaire Drouineau : L’INRAE est un institut de recherche français qui travaille sur le fonctionnement des écosystèmes et notamment sur l’impact du changement global sur le fonctionnement des écosystèmes. On pense notamment au changement climatique, à la pollution des écosystèmes, à la modification des habitats, à l’exploitation de ressources naturelles. 

On va essayer de comprendre comment ces différents impacts vont agir sur la dynamique des populations, c’est-à-dire comment l’évolution des abondances au sein d’une espèce va modifier le fonctionnement des réseaux trophiques : quelle espèce mange quelle espèce, se retrouve en compétition avec telle autre espèce, etc. 

Et en l’occurence quand on s’intéresse aux écosystèmes aquatiques, une des composantes de ce changement global, c’est l’impact que peut avoir les ouvrages de production d’électricité. Par exemple, le rejet thermique va modifier les habitats et la construction de barrages qui peut gêner la libre circulation et le déplacement des poissons au sein des cours d’eau.

Véronique Gouraud : Les écosystèmes sont multi-impactés en raison des pressions des différentes activités humaines qui s’exercent sur ces milieux. Tout l’enjeu de l’équipe de recherche commune HYNES, c’est d’arriver à identifier les leviers d’action sur lesquels on peut agir au niveau des aménagements de production d’électricité dans ce contexte multi-impacté. 

La collaboration avec l’INRAE date des années 1960. Les travaux ont démarré avec des questions sur l’impact des rejets d’eau chaude des centrales thermiques sur les écosystèmes aquatiques et ensuite au fil de l’eau, des partenariats ont été développés sur différentes thématiques.

Notre bilan

Hilaire Drouineau : Si on doit faire un bilan d’HYNES depuis sa création en 2009, on peut commencer par l’aspect emploi. Au sein de l’équipe, il y a 16 doctorants et 13 post-doctorants qui sont passés. Il y en a à peu près six en continu chaque année.

On peut aussi faire un bilan en termes de publications scientifiques, élément extrêmement important côté recherche. C’est quelque chose que je trouve de vraiment remarquable : pour des travaux de recherche plutôt finalisés, les travaux d’HYNES ont été valorisés et publiés dans les meilleures revues scientifiques académiques à travers le monde.

Véronique Gouraud : Au sein de l’équipe commune, nous travaillons sur une large diversité de thématiques, notamment sur la libre circulation des espèces de poisons dans les cours d’eau. L’objectif est d’apporter des conditions de migration satisfaisantes et de permettre aux poissons de franchir les barrages avec des dispositifs de franchissement. 

C’est ce qu’on appelle garantir la continuité piscicole. Nous travaillons également sur les débits écologiques, à savoir quels débits lâcher à l’aval des aménagements avec des valeurs qui vont permettre de garantir des conditions d’habitat satisfaisantes.

Hilaire Drouineau : Un second exemple me vient en tête. Il s'agit du saumon, qui redescend vers la mer, ou à travers des suivis de poissons qu’on a marqués et de la modélisation hydraulique au niveau des barrages. On a essayé de mieux comprendre le comportement des saumons afin d’optimiser les dispositifs de dévalaison, de mieux les placer et de mieux les dimensionner pour que les poissons puissent descendre sans impact. 

J'ai parlé de poissons migrateurs, mais il faut savoir que toute une partie de nos travaux vise aussi à optimiser le franchissement par des espèces non-migratrices, un enjeu qui est en train de monter actuellement.

Nos galères

Véronique Gouraud : L'une des difficultés qu’on rencontre dans les travaux qui sont menés dans l’équipe commune de recherche HYNES, c'est l’intégration des différentes échelles spatio-temporelles. Pour arriver à expliquer l’état de la biodiversité sur un tronçon de cours d’eau, il faut arriver à prendre en compte les facteurs locaux qui s’exercent sur cette biodiversité. Il faut aussi prendre en compte des processus qui s’exercent à une échelle beaucoup plus large, à l’échelle de la région. 

La deuxième difficulté que l'on rencontre, c’est la diversité des impacts générés par les aménagements de production d’électricité. Cette diversité d’impacts est liée au fait qu’on a une diversité de milieux d’implantation.

Hilaire Drouineau : HYNES est un partenariat qui a toujours très bien fonctionné. C’est amusant car c’est un partenariat sur une thématique de recherche appliquée avec des enjeux opérationnels très bien définis, ce qui pourrait apparaître à première vue comme une contrainte. 

Mais finalement, c’est extrêmement stimulant de travailler et de mener des recherches pour apporter des solutions concrètes qui ont des traductions immédiates sur le terrain.

Nos solutions

Véronique Gouraud : Les deux organismes apportent des compétences très complémentaires. L’INRAE apporte des connaissances pointues en écologie. Il dispose de moyens d’investigation pour échantillonner les milieux aquatiques, et apporte toute son expérience sur le fonctionnement global des écosystèmes.

Hilaire Drouineau : HYNES pour l’INRAE est l’occasion de collaborer avec des scientifiques d’EDF qui sont de vrais experts de l’impact des ouvrages hydroélectriques sur les écosystèmes aquatiques et sur les populations de poissons. C’est aussi l’occasion d’avoir accès à des sites d’étude et des chroniques de données, auxquels on n’aurait pas forcément accès. 

De plus, les échanges qu’on peut avoir au sein de cette équipe font émerger de nouvelles questions de recherche qu’on n’aurait pas anticipées autrement.

Nos partenariats

Véronique Gouraud : Les travaux de l’équipe permettent aussi de répondre à des appels à projets européens. Nous avons été retenus pour deux projets : D-HYDROFLEX et ReHydro. Ces deux projets, menés avec de multiples partenaires européens, ont pour objectif de concilier production d’électricité et préservation de la biodiversité. 

ReHydro a pour objectif à la fois d’augmenter la production d’électricité, d’augmenter sa flexibilité, tout en réduisant les impacts environnementaux et en répondant aux besoins des autres usages de l’eau, à savoir la navigation, l’alimentation en eau potable ou les activités récréatives.

Hilaire Drouineau : La bonne nouvelle est que la convention vient d’être renouvelée pour six ans. On va donc pouvoir continuer à travailler ensemble jusqu’en 2030 sur ces questions passionnantes.

Notre avenir

Véronique Gouraud : Dans les années à venir, nous allons élargir le périmètre scientifique de l’équipe et également intensifier nos efforts sur deux thématiques. La première, ce sont les effets du dérèglement climatique. Comment mieux prendre en compte ce contexte de changement climatique et comment dans ce contexte, identifier les bons leviers d’actions sur lesquels agir. 

La deuxième thématique, ce sont les mesures de restauration. Comment mettre en place des mesures de restauration efficaces qui vont permettre de régénérer les écosystèmes et améliorer leur état de santé. 
 

Une collaboration historique pour une recherche finalisée

Les premières collaborations remontent aux années 60. EDF exprime alors un premier besoin concernant l’impact de son activité de production électrique. « L’objectif initial était d’évaluer l’impact des rejets d’eau chaude dans l’environnement aquatique effectués par les centrales thermiques », explique Véronique Gouraud, chercheuse senior à la R&D d’EDF.

Depuis, le partenariat se consolide autour d’un objectif commun : mesurer, comprendre, identifier des leviers d’action pour développer des solutions opérationnelles pour maitriser les effets des activités d’EDF, notamment ceux de la production hydraulique et nucléaire, sur les écosystèmes aquatiques.

Les compétences apportées en écologie par les deux équipes se complètent. L’INRAE étudie le fonctionnement et la modification globale des écosystèmes sous contrainte des différents types de pressions humaines. EDF apporte de son côté une connaissance fine des interactions des aménagements de production d’électricité avec les milieux naturels. Le co-développement et le partage des connaissances, des outils et des modèles au sein d’HYNES sont précieux pour EDF dont les activités de production dépendent en grande partie de la ressource en eau avec des conditions de milieu très diversifiées d’un aménagement à un autre. Pour mener à bien ces travaux, EDF met à disposition des données, des accès aux sites tandis que l’INRAE facilite l’accès à des bases nationales, ce qui permet d’aller plus loin dans les questions abordées.

Une collaboration riche en enseignements

Les fruits de ce partenariat sont nombreux.

Sur le terrain de la continuité écologique, par exemple

Les travaux de l'équipe ont permis la construction et l'amélioration de l'efficacité de dispositifs de franchissement des ouvrages (passes à poissons, exutoires de dévalaison…). Par ailleurs, la gestion des flux d’eau a amélioré les conditions pour les espèces migratrices comme le saumon et l’anguille. C’est le cas, par exemple, sur le barrage de Poutès, où les recherches ont abouti à des modèles simulant le comportement migratoire des poissons à l’approche du dispositif de dévalaison conçu sur le site. Ces résultats permettent d’augmenter l’attractivité des dispositifs en testant plusieurs configurations en amont des barrages. Toujours sur le terrain de la continuité écologique, les travaux menés sur la détection des poissons dans les dispositifs de franchissement, via l’analyse de données de caméras acoustiques, seront poursuivis dans le cadre du projet européen D-Hydroflex. L’objectif de ce projet est de développer des technologies innovantes de mesure in situ associées à des solutions numériques en appui aux centrales hydroélectriques, pour une production électrique plus efficace, plus durable et plus compétitive sur les marchés de l'électricité.


Chaque année, jusqu'à six jeunes chercheurs (doctorants et post-doctorants) rejoignent l’équipe, encadrés par des experts d’EDF et de l’INRAE. Cette dynamique favorise le partage des savoirs et le développement de nouvelles compétences.


Autre exemple : la gestion des débits

Les travaux sur les « éclusées » – variations rapides des débits dues à la production hydroélectrique – ont permis d’évaluer leurs impacts sur les habitats des poissons et macroinvertébrés, mais aussi d’étudier leur influence relative par rapport aux autres facteurs environnementaux (crue, structuration naturelle des communautés de l’amont vers l’aval) et de proposer des solutions pour atténuer ces effets. Les résultats des travaux menés dans l’équipe, sur la basse vallée de l’Ain, ont servi, par ailleurs, pour répondre avec l’INRAE à un appel à projet européen Horizon. Le projet ReHydro a été retenu avec pour objectif de concilier augmentation de la production d’électricité, réduction des impacts écologiques, et compatibilité avec les autres usages de l’eau ; tout ceci en intégrant les conséquences du dérèglement climatique et l’adéquation entre production d'électricité et préservation de la biodiversité. L’ensemble de ces thématiques seront étudiées sur ce site, retenu dans le projet comme site de démonstration.

Une autre problématique s’avère de plus en plus prégnante dans les travaux de recherche, celle du dérèglement climatique. « La dernière convention renouvelée en 2024 nous a permis d’ajouter, dans le périmètre scientifique, le renforcement des efforts sur les effets du dérèglement climatique et la restauration des milieux », annonce Véronique Gouraud.

Le partenariat est également fructueux pour les publications qu’il génère. Ses avancées sont régulièrement valorisées par des publications dans des revues scientifiques prestigieuses à travers le monde.

« Ce partenariat impose des contraintes opérationnelles, mais il est aussi une source de satisfaction », conclut Hilaire Drouineau. « Il est exaltant de voir nos recherches avoir un impact direct sur les pratiques industrielles et la préservation de la biodiversité. Par ailleurs, l’aspect opérationnel immédiat fait émerger des questions de recherche qu’on n’aurait pas forcément anticipées ».

Christine Argillier, chercheuse à l’INRAE, confirme : « Ce cadre de recherche finalisée est exigeant, mais il offre des résultats concrets et immédiats pour la gestion écologique. Il donne du sens au travail des chercheurs, qui en demandent de plus en plus, notamment dans les nouvelles générations. »

Contacts

Véronique Gouraud : veronique.gouraud@edf.fr

Hilaire Drouineau : hilaire.drouineau@inrae.fr