Particulièrement performant pour faire des économies de gaz et d’eau et éligible aux CEE* depuis fin 2013, le traitement d’eau par osmose inverse (déminéralisation) est désormais accessible à tous les industriels. Explications de François Racapé (EDF R&D) corédacteur de la fiche CEE associée, et de Karim Derrouiche, chargé d’études chez Babcock Wanson, commercialisateur de solutions de chaufferie.

En quoi consiste le procédé d’osmose inverse ?

Les chaudières à vapeur se détériorent particulièrement vite (corrosion, tartre, dégradation) lorsque l’eau utilisée est chargée en sels minéraux et en impuretés. Il convient donc d’éliminer ces éléments indésirables en procédant à un traitement d’eau en amont de la chaudière. Solution la plus basique, l’adoucisseur permet d’éviter la formation de calcaire. Un osmoseur installé en complément permet de traiter les bicarbonates, les chlorures et la silice, susceptibles d’endommager l’installation et d’en dégrader le rendement. Sans osmoseur, l’industriel est en effet contraint de rejeter à l’égout une forte quantité d’eau à des températures élevées pour évacuer ces impuretés. Par exemple, dans certaines régions où l’eau est très dure, 3 tonnes d’eau sont parfois nécessaires pour produire 2 tonnes de vapeur. La déminéralisation par osmose inverse permet de limiter le débit de ces purges et donc de réduire significativement les surconsommations de gaz et d’eau qui y sont associées.

Quels sont les critères qui permettent de dimensionner le traitement de l’eau ?

Premier point, la dureté de l’eau qui varie suivant la région, et qui est traitée dans l’adoucisseur. De même, les concentrations en bicarbonate, chlorure et silice varient géographiquement. L’un de ces éléments constitue « l’espèce limitante », c’est-à-dire celle qui dimensionne un éventuel osmoseur. Autre point essentiel à évaluer, le taux de retour des condensats, autrement dit la part de vapeur condensée qui revient en chaudière et qui pourra être réutilisée par l’installation sans avoir besoin d’être retraitée. On en déduit le débit d’eau « d’appoint », c’est-à-dire le débit d’eau brute à traiter.

Quelles économies les industriels peuvent-ils attendre de l’osmoseur ?

Elles sont de trois ordres : économies d’énergie, économies de produits de conditionnement chimique de l’eau, et enfin économies d’eau. Prenons l’exemple d’un site agroalimentaire dans le Poitou, où EDF, en collaboration avec Babcock Wanson, a pu installer un osmoseur à l’occasion d’une révision complète de l’installation de production de vapeur. Sur une production de 180 000 tonnes de vapeur par an à 8 bars, nous sommes passés d’un taux de purge initial de 16 % à un taux de purge de 3 %. Autrement dit, la chaudière ne rejette plus que 30 litres d’eau par tonne de vapeur produite contre 160 litres auparavant. Cela permet d’éviter de chauffer à 175 °C 27 500 m3/an d’eau, et donc de réduire la consommation de gaz de 5 GWh/an. Le site économise également 400 kg/an de produits de conditionnement chimique et, grâce à la meilleure qualité de la vapeur produite par la chaudière, la maintenance s’est améliorée. Ce fonctionnement dans les meilleures conditions permet d’assurer un coût très compétitif de la tonne de vapeur.

Pourquoi n’y a-t-il pas plus d’osmoseurs dans l’industrie ?

Ce procédé souffre de plusieurs idées reçues. En effet, on accusait à tort l’osmose inverse d’être consommatrice d’eau (froide), mais c’est sans compter les économies d’eau (chauffée et conditionnée chimiquement) permises par la réduction des purges de la chaudière et l’amélioration de cette technologie. Ces dernières économies sont souvent bien supérieures en volume car elles s’appliquent à la totalité du débit d’eau et pas seulement au débit d’eau d’appoint. On a aussi reproché à ce procédé d’être énergivore. Aujourd’hui il existe des membranes à très basses pressions qui permettent de diminuer drastiquement les consommations électriques. Enfin, on disait l’osmoseur cher et réservé aux grosses installations. Or, en 10 ans, son prix a été divisé par 3.

Quel retour sur investissement espérer ?

La publication fin 2013, à l’initiative de Babcock Wanson et d’EDF R&D, d’une fiche CEE valorisant le traitement d’eau performant pour les chaudières vapeur bonifie significativement le temps de retour sur investissement : initialement de quatre ou cinq ans en moyenne, celui-ci est passé sous la barre des trois ans. Il est à affiner au cas par cas.

* Certificats d’économies d’énergie

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Groupe de services et constructeur commercialisant ses propres produits, Babcock Wanson Groupe CNIM est un acteur international majeur dans le domaine des chaufferies industrielles. Sa gamme complète et très large de services, de systèmes et d'équipements apporte aux industriels des solutions sur mesure dans une démarche globale d'efficacité énergétique et de réduction de l'impact environnemental.