Fin 2024, la R&D affirme son engagement en faveur de la biodiversité en lançant une initiative locale hors du commun : PAX APIUM et les abeilles butinèrent en paix. Cette initiative montre comment l'innovation technologique et l’expertise de la R&D peuvent servir la préservation de la biodiversité.
Genèse du projet
Sur le site EDF Lab Chatou sur l'île des Impressionnistes, une rencontre fortuite entre un ingénieur et un apiculteur local a donné naissance à un projet ambitieux et inattendu. Jean-Marie Cottin, chercheur en contrôle-commande (entité dotée d’une connaissance approfondie des process et systèmes, pour l'optimisation et la maitrise de la production dans le contexte de la transition numérique) à la R&D d'EDF, consacre une partie de son temps aux actions environnementales sur le site d'EDF Lab. C'est là qu'il croise Frédéric Dupeley, apiculteur passionné confronté à un fléau qui décime ses colonies d’abeilles : le frelon asiatique.

Cette espèce invasive, arrivée en France au début des années 2000, représente aujourd'hui l'une des principales menaces pour les populations d'abeilles. Un seul frelon peut capturer jusqu'à cinquante abeilles par jour, provoquant ce que les spécialistes qualifient d'« hécatombe ». Face à ce constat alarmant, Jean-Marie Cottin décide d'agir en mobilisant les compétences techniques de son département de recherche.
Cette prise de conscience le mène à réfléchir et à proposer une initiative locale avec Oussama Berguiga, data scientist au sein du même département de recherche pour développer une solution technologique innovante. Le principe repose sur un système de détection du frelon asiatique par traitement d’images et acoustique capable de distinguer l'insecte par sa différence de taille et son type de vol. En effet, les frelons asiatiques restent en stationnaire à proximité de la ruche et attaque dès qu’une abeille sort de celle-ci. A ce moment-là, la solution permettra de neutraliser le frelon détecté.
« L’objectif est de fournir aux apiculteurs une solution rapide, simple, et peu onéreuse à fabriquer, notamment en leur permettant d’utiliser une imprimante 3D pour créer la solution de manière autonome. » explique Jean-Marie.
Le dispositif imaginé, conçu comme un kit open source d'environ 300 euros, combinerait reconnaissance d'images, géolocalisation sonore et système de neutralisation par laser ou tir automatisé.
Une technologie de pointe au service de la nature
Le projet, baptisé « Pax Apium - la paix des abeilles » s’inscrit dans l’un des quatre axes de la stratégie biodiversité du groupe EDF. Il illustre également la capacité de la R&D à mobiliser ses compétences multidisciplinaires ; en intelligence artificielle embarquée, en automatisme et en contrôle-commande, au service d’enjeux environnementaux.
Le dispositif en cours de développement repose sur un système de détection visuelle et sonore. Des caméras et micros enregistrent les mouvements et les sons autour des ruches. Les données collectées sont ensuite analysées pour distinguer les frelons des abeilles, notamment grâce à leur taille, leur trajectoire et leur signature acoustique. Une fois le frelon identifié, un laser ou système de tir de petits projectiles est activé pour le neutraliser.
Une démarche expérimentale et collaborative
Le projet, encore à l’état de prototype, se déploie en plusieurs étapes :
• collecte de données via des prises de vue stéréoscopiques et de son ambisoniques fin juillet et août 2025, lorsque les frelons commencent à attaquer,
• entraînement des algorithmes de localisation grâce aux données collectées,
• tests en laboratoire,
• puis expérimentation sur le terrain.
Les apiculteurs locaux sont mis à contribution pour fournir des enregistrements sonores et visuels, indispensables à l’apprentissage des modèles.
En 2025, les deux chercheurs disposent de quinze jours chacun pour faire avancer le projet. Un temps limité, qui ne permettra pas de finaliser le prototype, mais suffisant pour poser les bases d’une expérimentation prévue à l’été 2026. Si les essais s'avèrent concluants, le dispositif sera mis à disposition de la communauté mondiale des apiculteurs sous licence open source. Cette approche collaborative permettrait aux utilisateurs de réaliser l'impression 3D des composants, d'assembler le système et de le programmer selon leurs besoins spécifiques.
Une innovation à fort potentiel
Cette initiative illustre une tendance émergente dans le monde de la recherche industrielle : la mobilisation des compétences techniques développées pour les besoins de l'entreprise au service d'enjeux environnementaux plus larges. Pour EDF, le projet Pax Apium représente ainsi une vitrine concrète de l'expertise multidisciplinaire des équipes du département de recherche PRISME (Performance, Risque Industriel et Surveillance pour la Maintenance et l’Exploitation) de la R&D.
Reste à savoir si cette expérimentation prometteuse parviendra à surmonter les défis techniques et budgétaires qui jalonnent encore son développement. L'avenir des abeilles de l'île des Impressionnistes, et peut-être bien au-delà, pourrait en dépendre.