Camille est responsable du courrier de la présidence du groupe EDF, avenue de Wagram à Paris. Auparavant, il avait notamment été conseiller clients particuliers. Le Rennais est aussi un rappeur qui écrit et interprète.

« Ma musique est mon héritage / si je rappe, c’est uniquement du partage… » Qui est Camille Nathan, regard bleu, voix douce aux mots choisis, et humour au second degré ? Aujourd’hui, il réceptionne, ouvre, analyse, classe, archive et assure le suivi du courrier du directeur général d’EDF.
« La colo des homards »
Tout commence en Bretagne. Saint-Brieuc, où il voit le jour, mais surtout Rennes - « Rain City », sa ville de cœur, où il passe toute son adolescence. Ses parents sont ouvriers pour Chaffoteaux et Maury, l’usine de chaudières à gaz, « plus par conviction politique que par obligation ». Les années 1970 en ont fait des militants. Des artistes aussi. La mère de Camille est écrivain. Dorothée Letessier a signé un best-seller, Le Voyage à Paimpol, l’année où il naît. Son père, passionné d’écumes bretonnes deviendra réalisateur de documentaires pour la télé. La famille est à Paris un temps, mais Camille revient à Rennes avec son frère lorsque les parents divorcent. Il vit avec son père. « On faisait des courts-métrage entre copains, à la maison, on a toujours filmé. » Plus tard il assiste son père qui réalise « La Colo des homards », un documentaire qui suit des adolescents en colo à Belle-Ile en mer, avec la fille de Françoise Dolto. L’adolescence de Camille ? « J’ai entamé un bac littéraire option cinéma, puis j’ai rejeté le modèle parental et le système scolaire en général… avant de me réorienter vers un bac Commerce ». Depuis qu’il vit à Rennes, il se sent attiré par le monde du rap. Camille écrit comme il respire, des histoires, des scenarios, des listes… Au collège, il écrivait même chaque jour une chanson, comme un journal intime. On lui attribue un « blaze », un nom, en cinq lettres : Mekah, le diminutif de Camille en verlan. Au milieu des années 1990, il évolue ainsi sur la scène Hip Hop de Rennes avec un style décalé, poétique et engagé.
« La culture, c’est comme la confiture »
Il se lance même dans la radio avec une émission sur Radio Campus, « La culture, c’est comme la confiture », puis une émission de rap en direct, « C.Fran & Direkt ». Lancements, transitions, jingles, impros, Camille se lance. En parallèle de cette activité bénévole, il multiplie les petits boulots en intérim : il se lève à 5 heures pour trimer chez Carrefour, vend des disques au Virgin Megastore, nettoie même des abattoirs. Mais il travaille surtout comme téléconseiller pour Teleperformance, où il faut enchaîner appels sur appels. Là, il a son premier contact avec EDF, en 2007, à Lyon, où il conseille les clients particuliers. Pourquoi ne pas postuler directement à EDF ? Retour en Bretagne : le voilà embauché sur le CRC de Cesson-Sévigné, du côté des clients professionnels cette fois.
« EDF recrutait, c’était l’ouverture du marché à la concurrence. Les façons de travailler ont vite évolué, les méthodes sont devenues plus commerciales. Cela m’a sorti de ma timidité. En fait, faire de la radio et du téléphone m’a aidé à être plus à l’aise, à m’adapter. »
Au bout de quatre ans en centre d’appels, Camille a envie d’autre chose. Il veut « découvrir l’univers technique d’EDF ». Virage à 180 degrés. Il passe d’un univers professionnel très féminin à un monde d’hommes lorsqu’il arrive à ERDF, à l’agence qui gère les postes sources parisiens. Là, il s’occupe des plannings des techniciens, des bons d’intervention, des budgets, mais aussi de la médiathèque et chapeaute même un petit journal interne, « Fiab’express ». C’est à cette époque que sort son album, totalement autoproduit, « Trop vrai pour être beau ». « Je rappe avec le cœur… je ne ferais pas plus de vente, même si je rajoute des chœurs »… Pourtant, les ventes sont au rendez-vous. A Rennes, il est connu comme le loup blanc, notamment grâce à son clip drôle et un peu provoc « Blanc » justement. Enfin, il peut rencontrer son public : petits festivals bretons, bars parisiens, fête de l’Humanité, Printemps de Bourges… la scène est pour cet ex-timide un vrai plaisir et un aboutissement. A Paris, il repart sur un autre poste, à la CMCAS où il gère les dossiers des bénéficiaires des IEG de Paris, « j’avais envie d’être dans l’utile, le social… quelque chose de plus proche de mes valeurs et de celles que m’avaient transmis mes parents, tous deux décédés peu de temps avant ». Mais un jour, il tombe sur une annonce, un poste de gestionnaire courrier au siège d’EDF, avenue de Wagram…
« Un type carré »
« Le premier entretien s’est très bien passé, mon parcours dans différentes entités a intéressé. Puis, l’on m’a rappelé pour me dire qu’il n’y avait pas de rédactionnel, que j’étais surdimensionné pour le poste, c’était bien la première fois ! », lâche-t-il dans un sourire timide. Pourtant, deux jours après on le rappelle de nouveau pour qu’il rencontre l’équipe. Ambiance feutrée, chaussures de ville et chemise à manches longues de rigueur, Camille-Caméléon change de décor. « Aujourd’hui, je réceptionne le courrier de Monsieur Lévy. Je réoriente les plis dans les différents services, et je suis étonné de tous les métiers qui existent.» Au fil des jours, il se sent bien, il connaît de mieux en mieux les métiers d’EDF, « c’est impressionnant tout ce qu’il y a dans le Groupe ! » « Plus mature qu'il y parait. Je prends les obstacles un par un, j'essaye d'être un type carré », écrit Camille Nathan dans un rap. Il est aussi le père d’Oscar et d’une toute petite Nora. Alors tous les jours, dans les transports, il écrit sur son téléphone. « Écrire une chanson, c’est comme envoyer une carte postale, pour rester dans la thématique du courrier. J’écris pour mes proches, pour laisser une trace… » C’est sûr, Camille sera connu avec adresse.